2018-04-20 Centre « Dumitru Staniloae »: Yvan Koenig – Patristique. La mystique syriaque (5). Séminaire 2e cycle (master)

25 avril 20180 Comments

2018-04-20 Centre « Dumitru Staniloae »: Pr. Yvan Koenig – Patristique. La mystique syriaque (5). Séminaire 2e cycle (audio mp3, podcast et vidéo)

Pr. Yvan KoenigCinquième séminaire de Patristique, 2e cycle (master), du professeur Yvan Koenig, dans l’année académique 2017-2018, sur La mystique syriaque (5): Saint Isaac le Syrien.

Le Pr. Yvan Koenig assure les cours de Patristique (voir le programme des cours du 1er semestre 2017-2018) dans le cadre du Centre Orthodoxe d’Études et de Recherche « Dumitru Staniloae » (année universitaire 2017-2018).

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Présentation de la cinquième conférence sur la mystique syriaque (20 avril 2018): Saint Isaac le Syrien (résumé)

Il naquit en 633 dans la région du Qatar qui, à l’époque, était christianisée et où le monachisme était florissant. Cette région ne sera dominée par les arabes qu’en 650.

Isaac fut évêque de Ninive et on le connaît aussi sous le nom d’Isaac de Ninive. Mais il renonça à sa fonction et rejoignit les solitaires dans l’est de l’Iran actuel (Beit Houzayé). Il se consacra à une vie d’ascèse rigoureuse qui lui fit perdre la vue, on le surnomma « le second Didyme » par référence à Didyme l’aveugle, ascète égyptien. Son œuvre comprend deux parties : d’une part 82 discours qui furent traduits en grec par des moines de Saint-Sabas en Palestine. C’est cette traduction que connu le monde orthodoxe et qui bénéficia d’une très large audience jusqu’à aujourd’hui. C’est une relecture dans l’esprit des églises chalcédoniennes. La seconde partie qui ne fut éditée qu’en 1995, contient une description de l’apocatastase origéniste condamnée par le IIème concile de Constantinople en 553.

L’Église de Perse était nestorienne, mais le nestorianisme n’eut pratiquement aucune influence sur lui.

Récemment (2012) un chercheur Belge, Marcel Pirard a publié les résultats d’une longue étude sur le texte de saint Isaac. Son ouvrage, écrit en grec, fut publié par le monastère d’Ivirôn. Son œuvre remet donc en cause les traductions antérieures et le Père Placide, de bienheureuse mémoire, envisageait de reprendre la traduction qu’il fit des Discours ascétiques en 2006. On trouvera ci-joint un bref historique de la version grecque des Discours ascétiques, faite par Marcel Pirard.

La doctrine ascétique de saint Isaac a comme point de départ la rupture radicale avec le monde (hésychia). Elle se fonde sur la miséricorde de Dieu et la dynamique du baptême et de la foi. Au fond, le but de saint Isaac n’est rien d’autre que la pleine réalisation de la grâce reçue par le Chrétien lors de son baptême. Cet épanouissement de la foi, se traduit par le développement d’une sensation spirituelle et une vision des réalités divines (théoria). Cette « foi qui voit » étant le plus haut degré de la vie spirituelle. Le repentir qui suit le baptême est alors une « seconde naissance » qui nous ouvre la porte de la miséricorde divine : « Comme une grâce venant après une grâce, le repentir a été donné aux hommes après le baptême. Le repentir est en effet une seconde naissance, qui vient de Dieu. Ce que nous avons reçu comme un gage par le baptême, nous le recevons comme un don par le repentir. Le repentir est la porte de la miséricorde, laquelle s’ouvre à ceux qui la cherchent. C’est par cette porte que nous avons accès à la miséricorde divine, et, si nous n’entrons pas par elle, nous ne trouverons pas la miséricorde, « car tous ont péché et tous sont justifiés gratuitement par la grâce » (Rm. 3, 23-24). Le repentir est la seconde grâce, et il naît dans le cœur moyennant la foi et la crainte. » (Discours 72, 2).

Saint Isaac distingue plusieurs degrés dans la vie spirituelle : le degré corporel où l’homme est dominé par les passions, le degré psychique qui est la voie de la croix, « Personne ne peut monter au ciel confortablement », puis le degré spirituel. Ces degrés concernent la totalité de la personne humaine, corps, âme, et intellect : « La purification du corps est la sainteté obtenue en se débarrassant des souillures de la chair. La purification de l’âme est la liberté à l’égard des passions secrètes qui se tiennent dans la pensée, la purification de l’intellect (noûs) résulte de la révélation des mystères. En effet, il est ainsi purifié de tout ce qui tombe sous les sens en raison de sa matérialité. » (Discours 17, 5).

Saint Isaac met l’accent sur les jeûne, les veilles nocturnes et la garde des pensées. Conditions nécessaires au développement d’une sensibilité spirituelle « qui permet à l’homme de recevoir les réalités divines et les choses de Dieu et d’en goûter la douceur d’une façon immédiate et concrète, comme nos sens perçoivent de leur côté, les objets matériels. » (Discours 86, 4).

Le repentir est donc la première phase de la vie spirituelle, car il conduit à l’humilité et au cœur miséricordieux qui est « une flamme qui embrase le cœur pur pour toute la création, pour les hommes, pour les oiseaux, pour les animaux, pour les démons, et pour tout être créé. » (Discours 81, 2).

La miséricorde joue donc un rôle fondamental pour saint Isaac car son acquisition permet de communiquer avec Dieu qui est par essence miséricordieux : « La possession effective de la miséricorde universelle produit aussitôt dans l’âme la communion à la divinité et l’unit à sa gloire resplendissante… il n’est pas d’autre chemin pour parvenir à l’amour spirituel, qui forme en nous l’image invisible, que de pratiquer avant tout la miséricorde en imitant la perfection du Père, selon la parole de notre Seigneur (cf. Mt 5, 48 et Lc 6, 38). » (Discours 1, 32).

La découverte de Dieu dans le miroir de l’âme la transfigure en la faisant communier à cet amour universel : l’âme devient connaissance immédiate et apophatique de Dieu, c’est une connaissance par « connaturalité ». Rien n’est plus étranger à la spiritualité chrétienne que les discours de haine et d’exclusion.

Comme tous les grands spirituels, saint Isaac nous explique qu’il y a un « au-delà de la prière » alors, « toute lèvre et toute langue se taisent : le cœur qui contient les pensées, l’intellect qui gouverne les sens, et la pensée cet oiseau rapide et audacieux, font silence. Toute leur activité, toute leur industrie et toutes leurs recherches s’arrêtent, car le Maître de maison est là. » (Discours 31-32, 1-3).

Dans le degré psychique, l’âme était active avec la synergie de la grâce. Désormais, elle entre dans un état passif sous la mention de l’Esprit ; ravie dans « l’émerveillement » et la « stupeur », elle se trouve, si on peut dire, dans un « état de consentement » et d’adhésion, libre en sa racine, mais au-delà de toute réflexion et délibération, à ce que l’Esprit Saint opère en elle.

Bibliographie :
Saint Isaac le Syrien, Discours ascétiques selon la version grecque, Traduction introduction et notes par le R.P. Placide Deseille, Monastère Saint-Antoine-Le-Grand et Monastère de Solan, 2006.

Yvan Koenig

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Retraité depuis peu, Yvan Koenig a été chercheur au CNRS, enseignant à l’EPHE et à l’Institut Catholique. Égyptologue, il s’est spécialisé dans le déchiffrement et la publication des papyrus. Il a également traduit du grec moderne plusieurs ouvrages de spiritualité orthodoxe publiés aux éditions de l’Âge d’Homme et aux éditions du Cerf. Il est professeur invité à l’Institut Saint Serge (théologie ascétique).

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